"La mission a relevé plusieurs mécanismes ayant conduit à réduire la probabilité d'un agrément, et plus encore, à orienter, de manière systématique, les propositions d'adoption sur certains profils de parents, au détriment d'autres", constate l'Igas dans sa synthèse.
L'Igas avait été saisie après des propos tenus par une responsable du service adoption de Seine-Maritime en juin 2018.
Pascale Lemare avait estimé dans un entretien à France Bleu Normandie que les couples homosexuels étaient "un peu atypiques" et avait suggéré qu'ils pouvaient adopter des enfants "atypiques", comme des enfants "handicapés".
Le rapport observe qu'"une sélection s'est imposée progressivement dans le parcours des adoptants: une information dissuasive pour les célibataires et les homoparents et une sélection plus restrictive des célibataires à la phase d'apparentement". Autrement dit, "il a existé une règle tacite privilégiant les couples hétéroparentaux". Et, "s'agissant des demandes d'homoparents, l'adoption ne leur a été proposée, sur la période 2013 (date de la loi ouvrant l'adoption aux couples homosexuels) à 2017, que pour des enfants ayant des besoins spécifiques", c'est-à-dire en mauvaise santé ou handicapés.
La mission juge que "cette posture est paradoxale qui conduit à ne pas considérer ces familles comme prioritaires pour l'accueil d'un nouveau né sans besoins spécifiques et à leur reconnaître des compétences particulières pour accueillir un enfant plus âgé et /ou présentant des problèmes de santé ou de handicap".
L'Igas souligne que le contrôle n'a porté que sur le département de Seine-Maritime. "Toutefois, il ressort des entretiens nationaux que l'exclusion des célibataires de l'adoption nationale serait couramment pratiquée dans une majorité de conseils de famille en France". En ce qui concerne les couples homoparentaux, "des conseils de famille semblent un peu moins fermés" et "les couples ayant adopté seraient d'une dizaine à ce jour".
L'inspection formule 14 recommandations, notamment de "consolider le pilotage national" et "garantir par l'adhésion à une charte de déontologie, l'absence de discrimination entre les familles".
L'association des familles homoparentales ADFH, qui avait porté plainte contre Pascale Lemare, "salue le travail de l'Igas en la matière et souhaite que le ministère de la Santé engage une réforme permettant de supprimer les discriminations entre les adoptants".
De son côté, le ministère des Solidarités et de la Santé estime que "ce rapport, s'il ne fournit pas d'éléments tangibles permettant de conclure, en Seine-Maritime, à une discrimination à l'égard des couples homoparentaux, met en lumière l'encadrement insuffisant et le manque de transparence de certaines phases de la procédure d'adoption des pupilles de l'Etat".
Aussi la ministre Agnès Buzyn demande à Adrien Taquet, secrétaire d'Etat chargé de la Protection de l'enfance, "de conduire une réflexion sur le sujet de l'adoption", selon le communiqué du ministère.
En outre, "une mission parlementaire appuyée par des membres de l'Igas sera prochainement lancée" pour "traiter de l'adoption des pupilles en vue d'une amélioration de la transparence et de la lisibilité des procédures".
Rédaction avec AFP
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